Les cheminots pendant la première guerre mondiale

PROLOGUE

Nous avons eu l’occasion de vous rapporter sur notre site “ la vie de personnages de nos villages “ dont voici quelque extraits :

La majorité des personnes évoquées faisaient partie du monde rural local.

Voyons maintenant d’autres personnages de cette époque si douloureuse : La vie des cheminots pendant la guerre 14-18.

UNE PAGE D’HISTOIRE, UNE PAGE DE VIE

Dans le cadre de l’histoire d’une part, puisque le récit qui va suivre se situe largement pendant la première guerre mondiale, mais aussi dans le cadre du chemin de fer, puisque nous verrons ce monde bien particulier des cheminots mobilisés sur place au service de la nation en guerre. En 1914, l’Entreprise ferroviaire doit faire face à l’énorme besoin de transport de l’armée : hommes, matériels, munitions, convois sanitaires et de ravitaillement.

Pour assurer ce service, le personnel ferroviaire est “mobilisé sur place” suivant la formule officielle : les mécaniciens et chauffeurs, les personnels des dépôts et des ateliers, les aiguilleurs, les personnels des gares, tout un monde qui va assurer la bonne marche de la grande entreprise ferroviaire nationale formée par les Compagnies de l’époque. Soulignons que ce n’est qu’en 1938 que sera créée la SNCF qui sera l’unique exploitant national.

Et rappelons qu’en 1914, le Nord comme l’Est de la France où vont se dérouler les combats, le mode de traction des trains était la vapeur,impliquant de lourdes locomotives chauffées au charbon et demandant un approvisionnement en eau pour produire la vapeur.

Rappelons également que la ligne Paris-Strasbourg a été mise en service en 1852 et a vu un maillage de lignes ferroviaires s’étoffer sur l’ensemble du territoire dans un but de desservir le reste du pays mais, après l’épisode regrettable de la guerre de 1870 se traduisant par la perte de l’Alsace Lorraine, de créer une desserte stratégique pour l’heure de la revanche, laquelle a sonné en 1914.

Voici maintenant une page d’histoire, une page de vie d’un cheminot à l’époque de la guerre 1914-1918.

En 1914, Paul PIERSON (1885-1974) était chauffeur au dépôt de CONFLANS-JARNY (54) à la Cie des Chemins de fer de l’Est. Il avait débuté à ce dépôt en 1903, affecté à la préparation de la mise à feu des locomotives, au nettoyage des machines et l’entretien des boîtes à fumées qui noircissaient généreusement le jeune opérateur, avait été son premier emploi. Ses parents cultivateurs avaient vu d’un mauvais oeil ce métier de cheminot éloigné de l’agriculture. Et pourtant, dès qu’il le pouvait, Paul Pierson à chaque repos de son travail de cheminot, allait courageusement participer aux travaux des champs pour aider sa famille.

En 1914, il était déjà un chauffeur roulant, marié et père de deux filles.

Dès la déclaration de la guerre, le dépôt de CONFLANS-JARNY est évacué et Paul Pierson se retrouve affecté au dépôt de TROYES (10). Pendant toute la durée de la guerre il va être employé à la traction des trains militaires chargés de ravitailler en hommes et en matériels les troupes du front de la Marne. C’était des trains de munitions, du ravitaillement en vivres, des permissionnaires, des blessés, des troupes fraîches, mais aussi des trains d’évacuation des civils habitant les zones avancées. Il faisait équipe avec un mécanicien qui, comme lui, venait de CONFLANS-JARNY et qui n’était autre que son beau-frère Paul PERNOT. C’était “ l’équipe des deux Paul”

Depuis le dépôt de TROYES, ils partaient pour un périple de huit jours d’affilées et parfois 15 jours de durée en double équipe, les menant dans les zones de REIMS, CHÂLONS s/Marne , Ste MENEHOULD, VERDUN, et souvent dans des lieux fort avancés sur le front puisque le convoi essuyait le feu de l’ennemi. Leur locomotive approvisionnée en charbon était accouplée à un wagon qui servait de logement pour la double équipe. Là aussi il fallait prévoir le ravitaillement des hommes. Quand le tandem mécanicien-chauffeur était en service, l’équipe de remplacement se reposait dans le wagon-logement. Il n’y avait pas d’heures pour pouvoir assurer les convois et on roulait jour et nuit. Le plus important était l’approvisionnement en eau et charbon de la locomotive.

La conduite des trains au plus fort de cette guerre était extrêmement dangereuse car les convois étaient particulièrement vulnérables. En plein jour, la locomotive se signalait par son panache de fumée, et en période de nuit la recharge du feu dans le foyer était très visible par l’ennemi déclenchant des tirs d’artillerie destructeurs.

La fin de la guerre a été accueillie avec soulagement et a permis à Paul PIERSON de retrouver la Lorraine. Passé mécanicien en titre, il a été affecté au dépôt de PAGNY s/ Moselle et pendant de longues années il a assuré la desserte voyageur omnibus du parcours PAGNY s/ Moselle, ONVILLE,THIAUCOURT la paix revenue.

Ses derniers trains relevaient du dépôt de METZ-FRESCATY. Il a pris sa retraite en 1935.

Paul_Pierson.jpg, juil. 2007

Paul PIERSON (1885-1974) à WAVILLE (54890) au lieu-dit "Bauland"

En arrière plan, le viaduc de 60m de débouché en 6 arches de 10m d'ouverture normale, chacune franchissant la rivière "Le Rupt de Mad" sur la droite et la RN52 bis au centre de la photo. Passage de la ligne 12, Nancy-Longuyon, sur laquelle Paul Pierson a souvent circulé.

EN GUISE DE CONCLUSION :

Réflexion sur le chemin de fer et les CHEMINOTS en guerre.

Nous venons d’évoquer une page méconnue de l’histoire de la première guerre mondiale. Elle a été écrite par ces modestes Cheminots qui ont assuré avec bravoure les transports indispensables dans des conditions dangereuses au service de l’Armée, au service de la Nation.

Beaucoup de ces hommes jeunes mobilisés ont perdu la vie et reposent dans les cimetières militaires.

Ne les oublions pas : Ayons une pensée pour toutes ces victimes de la première guerre mondiale.

Jean SPAITE Janvier 2020

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